Accueil > Actions / Actualités > Actualités académiques et nationales > Déclaration liminaire de la FSU Guadeloupe — CTA du 8 avril 2019

Déclaration liminaire de la FSU Guadeloupe — CTA du 8 avril 2019

vendredi 10 mai 2019, par Bureau SNES-FSU Guadeloupe

Monsieur le Recteur,

La FSU Guadeloupe souhaite la bienvenue au nouveau secrétaire général d’Académie, Monsieur Macé et lui souhaite la réussite dans ses missions. Il va de soi que pour la FSU, celles-ci seront menées dans le respect des textes, en toute transparence et équité.

La FSU Guadeloupe dénonce une nouvelle fois ici le projet de réforme des fonctions publiques qui s’apparente de fait à une destruction de nos statuts. Notre organisation syndicale qui appelait hier à la grève, comme l’ensemble des fédérations syndiquant des fonctionnaires, et qui appelle de nouveau à la grève le 14 mai prochain tient à rappeler les principes auxquels nous sommes attachés !
Le fonctionnaire est au service de la Nation, de l’intérêt général. Les conditions dans lesquelles il exerce ses missions sont formalisées par le statut, lequel comporte une partie législative, qui est votée par le Parlement.

Le statut, c’est un ensemble de textes législatifs et réglementaires qui prévoit et organise le lien entre le fonctionnaire et la Nation, durant sa période d’activité, mais aussi après, avec le code des pensions.

Conformément à la déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen de 1789, "Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents", l’État recrute par concours (et ce depuis 1794 avec l’École polytechnique) les meilleurs éléments d’une génération pour assumer les charges publiques. Pour se prémunir de la corruption, pour s’assurer de leur loyauté à l’intérêt général et pour les préserver des sirènes des intérêts particuliers, l’État garantit une carrière aux fonctionnaires ainsi recrutés, carrière qui doit assurer leur statut social et leurs conditions matérielles d’existence sur l’ensemble de leur période d’exercice mais aussi après. C’est la raison pour laquelle on distingue grade et emploi : conformément à l’exposé des motifs de la loi du 19 mai 1834 sur les officiers de l’armée de terre et de la marine, on considère que "si le grade appartient à l’officier, l’emploi appartient au roi". La carrière est donc garantie au fonctionnaire, y compris lorsque son emploi est supprimé.

Jusqu’à maintenant, il est protégé par les principes du paritarisme. Le dessaisissement des commissions paritaires, leur marginalisation dès le 1er janvier 2020, romprait avec le mouvement de démocratisation de la fonction publique, qui a prévalu au cours du XX° siècle, mouvement dont le programme du CNR, les grands équilibres du Statut général de 1946, et les lois Le Pors de 1983 / 1984 sont des jalons importants, sans oublier leur confirmation en 2010 sous la présidence de Nicolas Sarkozy.

Les droits du fonctionnaire, acquis à la Libération, seraient, si ce projet était maintenu, quasiment abolis. On établirait ainsi la conception du fonctionnaire héritée de la culture militaire, chère à Michel Debré, père de la constitution de 1958, du fonctionnaire qui "est un homme de silence : il sert, il travaille et il se tait". La FSU porte celle, héritée de la Résistance, du fonctionnaire citoyen, citoyen par excellence, qui participe à l’organisation du service et à la gestion des carrières, parce qu’il est citoyen comme les autres, mais aussi parce qu’il est comptable du bon fonctionnement de l’État, fonctionnement qu’il connaît, sur lequel il a une analyse, un avis et des propositions pertinentes à formuler.
Le fonctionnaire-citoyen a le droit de s’exprimer, de donner son avis, de voir cet avis pris en considération, car il est acteur conscient du fonctionnement des institutions publiques auxquelles il participe. Il a le droit d’expression et il est associé aux prises de décision et à la mise en œuvre des politiques publiques. Approche rétrograde donc dans cet article 1 de la loi Blanquer pour une école dite de la « confiance », adoptée le 19 février, qui prévoit qu’un fonctionnaire pourrait être inquiété dès lors que son administration considère qu’il nuit à l’image et à la réputation du service public d’éducation. Lancée sans aucune concertation, passant en procédure accélérée, cette loi cherche à bâillonner les personnels de terrain et en particulier les professeurs dans leur expression citoyenne et professionnelle. Les amendements adoptés laissent penser que drapeau et uniforme imposeraient un respect de l’institution au moment où l’École est privée des moyens de faire vivre les valeurs de la République, où la politique éducative ne fait qu’accroître les inégalités. C’est emblématique d’un autoritarisme éducatif bien éloigné de toute « confiance ».
Fondées à la Libération (Statut général de 1946), les CAP sont des instances de consultation préalable permettant de lutter contre l’opacité, l’arbitraire des décisions et leur corollaire que sont les passe-droits. Les représentants des personnels qui y siègent sont élus au suffrage universel direct de la profession : leur rôle de vérification de l’équité, la garantie de transparence qui en découle dans les opérations de gestion, principalement de mutation, de promotion et d’avancement, est connu et reconnu.

Dès le 1er janvier 2020, les CAP ne seraient plus consultées ni sur les mutations, ni sur les promotions ni sur les avancements ? Cela signifie que l’administration opérerait seule en ces matières, sans aucun contrôle collectif, laissant chaque fonctionnaire isolé face à sa hiérarchie et sans aucune garantie du respect de règles équitables et transparentes.

La seule voie de recours possible pour l’agent serait l’utilisation de la procédure dite du recours administratif préalable obligatoire (le RAPO), déjà appliquée depuis près de 20 ans aux personnels militaires : les militaires eux-mêmes, par la voie de leurs associations professionnelles de défense, en demandent l’abrogation, qualifiant ce dispositif d’« outil efficace de discrimination et de régression du droit ». En outre, la réforme de la Fonction Publique, dont le projet de loi sera bientôt présenté au Parlement, prévoit de développer la rémunération au mérite, au détriment du principe de carrière, mais aussi au détriment de la nécessaire solidarité des équipes et au détriment de l’intérêt général, car la rémunération au mérite et la culture du résultat qui la sous-tend font primer l’intérêt personnel ou la loyauté envers le supérieur hiérarchique direct sur la loyauté envers l’intérêt général.
C’est à dessein que nous avons employé le terme d’agent dans le paragraphe précédent. En effet, d’autres dispositions prévoient qu’en cas « d’externalisation » de services (en clair, cession ou attribution de services, par exemple au secteur privé), seront prononcés des détachements d’office (c’est à dire d’autorité) des personnels sans aucune garantie de retour dans l’administration d’origine ni recours possible. La généralisation annoncée du recours au contrat en lieu et place du recrutement de titulaires prépare un mouvement de bascule comparable à ce que l’on a connu des les grandes entreprises publiques dans les années 90, où les personnels sous statut sont passés de la norme à l’exception.

Enfin, en matière de santé, hygiène et sécurité au travail, les comités hygiène-sécurité-conditions de travail (CHS-CT) seraient fusionnés avec les comités techniques (CT). La perte d’indépendance des CHS-CT restreindra et entravera le contrôle exercé par les représentants des personnels sur les obligations des employeurs publics en matière de santé et de sécurité au travail. Enfin, le projet de loi prévoit une habilitation à légiférer par ordonnances en urgence pour « réformer et simplifier » dans la Fonction publique la médecine du travail, la médecine de prévention, les règles concernant les maladies professionnelles etc.

Monsieur le Recteur, ce comité technique académique se tient pour acter une circulaire mouvement qui aurait dû l’être depuis bien longtemps, et des suppressions de postes qui sont faites en catimini, en toute opacité. Cela pose d’autant plus gravement problème que ces collègues doivent participer au mouvement. La FSU a bien conscience que certains attendent avec impatience la disparition du paritarisme pour satisfaire leurs appétits d’autoritarisme, de clientélisme et de copinage, mais des règles existent toujours à l’heure actuelle, et la FSU se battra pour qu’elle soient acceptées.
Le syndicat majoritaire de la FSU dans le premier degré a d’ailleurs du intervenir violemment contre le mépris affiché par vos chefs de service Monsieur le Recteur, en quittant une CAP avant qu’elle ne puisse se tenir, puisque la personne qui l’avait convoqué, n’a rien trouvé de mieux que d’arriver une heure après l’heure à laquelle elle avait elle-même convoqué les participants !
Notre organisation syndicale ne cesse de dénoncer l’opacité dans cette académie. Quand allez-vous, Monsieur le Recteur faire le minimum pour que vous vous exemptiez de toute suspicion. Depuis un an que vous êtes arrivés, nous demandons systématiquement les BOP de l’académie ainsi que les IMP et leur répartition dans le second degré. Devons nous saisir la CADA pour vous imposer de fournir ces documents qui n’ont aucune raison de ne pas être rendus publics ?
Monsieur le Recteur, la FSU s’insurge contre la tenue de la journée de prévention telle qu’elle est organisée depuis deux ans. À qui s’adresse cette journée ? À tous les personnels de l’académie ? C’est une vaste plaisanterie d’organiser cette journée en dehors du temps scolaires, dans un espace qui ne peut accueillir plus de 200 personnes, alors que les personnels de l’académie sont plus de 5,000 !
Pour la FSU, il s’agit simplement pour le rectorat de se donner bonne conscience en organisant pour les personnels du rectorat disponible et les quelques personnalités triées sur le volet un petit déjeuner aux frais de l’Éducation Nationale, sans souci aucun de l’accueil réel des personnels !
La FSU Guadeloupe dénonce les choix des thématiques par Monsieur le Recteur : la résilience l’année dernière où l’on incitait les personnels à la prière et cette année « ambiances de travail ». Va-t-on nous expliquer qu’il faut être poli et souriant pour tout solutionner, ou nous refaire des blagues graveleuses et des conseils religieux ?
Puisque la FSU s’est déplacée ce matin pour constater une nouvelle fois la taille de la coquille vide de cette journée, nous avons des propositions à faire en matière de prévention : les sargasses, les brumes de sable, les rats, l’eau, les catastrophes naturelles, le travail par des températures dépassant 30 °… Et la liste n’est pas exhaustive ! Là, les personnels pourraient prendre à bras le corps les problématiques de leur quotidien, de celui de leurs élèves, de celui de vos enfants, vous qui êtes bien sagement assis à écouter le bréviaire insipide de Monsieur le secrétaire du CHSCTA.

Pourtant dans les établissements scolaires, les difficultés ne manquent pas : sur Saint-Martin, le collège Carnot à Pointe à Pitre, l’école R.Jolivières, l’ensemble des écoles qui ont été déclarées inaptes à accueillir du public et qui continuent d’en accueillir. Tout cela ne vous intéresse pas !
Le bureau de Monsieur le Recteur est neuf, vaste, climatisé, et semble avoir accès à l’eau potable ! Tout va très bien, tout va très bien,… Il suffit de le dire pour que cela soit vrai. La presse peut faire de belles images bien consensuelles aujourd’hui et assurer la promotion de l’institution. Pour la prévention ? Ce n’est pas grave ! Qui s’intéresse aux personnels dans une académie où les postes adaptés sont traités à la va vite dans le bureau de l’ancien DRRH sans aucune consultation des personnels ?
Vous voulez faire de la prévention ?
Démultipliez les réunions sur le terrain, au moins par bassin, faites le sur le temps de service des personnels, libérez les de leurs obligations, proposez leur des thèmes concrets de discussion et de réflexion. Et les collègues viendront, s’investiront, des solutions collectives émergeront et l’académie en sortira grandie !
Cela irait bien évidemment à l’encontre de la vision exclusivement descendante.
Cela serait bien moins médiatique. Cela risquerait de blesser de petits egos.
Cela risquerait même d’améliorer les conditions de travail des personnels et de réussite des élèves !
Alors chiche !!