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Rapport de la Cour des comptes sur l’éducation prioritaire

mardi 23 octobre 2018, par Bureau SNES-FSU Guadeloupe

Rapport de la Cour des comptes sur l’éducation prioritaire : Les incohérences de l’institution et des collectivités de tutelle en matière d’Éducation Prioritaire ne doivent pas occulter l’immense difficulté socio économique et éducative de notre territoire.

Depuis plusieurs années, la FSU Guadeloupe a alerté et défendu la nécessité de classer l’académie totalement en éducation prioritaire renforcée (REP+). En effet, il s’agissait du seul dispositif qui permettait de vraiment apporter des moyens d’encadrement suffisants pour répondre aux difficultés socio économiques de notre territoire. A titre de comparaison1, le département de la Seine Saint Denis a des indicateurs socio économiques 2 à 3 fois moins élevés que dans notre département et 3 fois plus d’élèves scolarisés en Éducation Prioritaire. La Réunion, la Martinique, la Guyane ont eux aussi des difficultés comparables aux nôtres mais l’éducation prioritaire y est nettement plus présente et par conséquent leurs élèves sont beaucoup mieux encadrés que ceux de Guadeloupe. Les résultats y sont meilleurs sauf pour la Guyane.

En quelques années et grâce aux campagnes de la FSU, la prise de conscience dans notre archipel des difficultés de nos élèves a progressé. Ce constat s’est d’abord appuyé, pour contourner la communication rectorale élitiste, sur des indicateurs externes [1] à notre institution (Journée de Défense et du citoyen) pour il y a quelques semaines trouver enfin appui sur des données publiées par l’Éducation Nationale [2] .

Nous nous réjouissons que nous soyons enfin tous conscients que nous ne pouvons plus faire semblant que tout va bien ! Par ailleurs, nous nous réjouissons également que le ministre de l’Éducation Nationale et la cour des comptes veuillent mieux inclure les élèves d’Outre mer dans l’Éducation Prioritaire. Espérons qu’il ne s’agisse pas encore juste d’effets d’annonce et une façon de tuer la discrimination positive dans l’allocation des moyens !

Afin d’éviter un retour à un égalitarisme des moyens irresponsable, la FSU Guadeloupe tient à mettre en garde sur la réorientation proposée par le ministre de l’Éducation Nationale et la cour des comptes. Aujourd’hui, toutes les études montrent que les 4 leviers les plus puissants pour améliorer l’enseignement sont la mixité sociale des établissements, le nombre d’élèves par classe, le suivi individualisé des élèves et la formation des enseignants.

Par conséquent, la recherche d’un enseignement de qualité ne peut se limiter au seul objectif de réduction des effectifs par classe comme annoncé. Cela d’autant plus, si par ailleurs, il engendre une augmentation des heures supplémentaires, de l’enseignement privé, de la rémunération au mérite et de la précarisation des enseignants (contractuels, AED enseignants, ...). C’est ce que propose pourtant le gouvernement et cette vision nous paraît clairement avant tout financière, conservatrice mais surtout réductrice des données scientifiques.

En effet, si l’étiquette Éducation Prioritaire peut être stigmatisante [3], elle l’est surtout pour les classes sociales aisées qui peuvent se permettre d’éviter l’établissement de secteur (transport, moyens financiers, ...). Cependant, dans tous les établissements où l’image de l’établissement est bonne, la mixité est préservée et l’éducation prioritaire fonctionne bien. Cette image doit attirée à la fois les familles mais surtout les enseignants. Pour cela, il faut leur offrir des locaux ergonomiques et bien entretenus, du matériel pédagogique, des relations avec leur direction apaisée car leur compétence de concepteur est reconnue, une charge de travail permettant le suivi des élèves, une sécurité des élèves et des enseignants assurés, des postes médicaux-sociaux pourvus, ... Tout ceci demande une synergie de l’Éducation Nationale avec des collectivités locales responsables et volontaires pour améliorer les conditions de travail, d’accueil des élèves et des enseignants. C’est souvent là que l’Éducation prioritaire échoue. Aucune continuité de l’action éducative n’est créée au travers de la politique de la ville. L’encadrement des enfants s’arrête à la sortie de l’école ou se poursuit avec une qualité d’encadrement médiocre qui n’attire que les enfants issus des familles les plus modestes faute de pouvoir offrir mieux. Les propositions de la FSU pour faire des établissements scolaires des pôles socio-culturels et éducatifs [4] doivent favoriser cette vision et offrir un lieu pour mutualiser les coûts, les échanges, les investissements humains et financiers, ...

Alors, penser un nouveau dispositif moins stigmatisant peut être envisagé. Pour autant, ce serait une erreur d’abandonner cette politique "emblématique, dont la Cour ne remet nullement en cause la légitimité ni les fondements", a précisé le Premier président de la Cour des comptes, alors que Jean-Michel Blanquer prépare une nouvelle réforme pour une mise en application à la rentrée scolaire 2020.

Cependant, un nouveau dispositif ne pourra faire l’économie de moyens et d’une réflexion globale autour des établissements, des conditions de travail des enseignants et de la continuité de leurs actions au-delà du temps.

Les incohérences de l’institution et des collectivités de tutelle en matière d’Éducation Prioritaire ne doivent pas occulter l’immense difficulté socio économique et éducative de notre territoire.


[1Lettre ouverte de la FSU Guadeloupe au président Macron - 30-03-2017 : https://drive.google.com/file/d/0B_MHKODxDuvANi0tNHVaajVscmc/view?usp=sharing

[2SNES Guadeloupe - Ouvrir les yeux ! https://www.youtube.com/watch?v=9-sBQbU4yVM

[3Mixité sociale à l’école - CNESCO : http://www.cnesco.fr/fr/mixites-sociales/

[4CP FSU Assises de l’Education - Parcours scolaires, Aménagement du territoire, Carte des formations, Société
en mutation 31-01-2018 : https://drive.google.com/open?id=19g7jQ83MlpbsREi09rcyTJxwGLa7y4aJ